Les mensonges des sondeurs

Les Français font confiance à … Les Français sont inquiets, sages, égoïstes ou généreux… La pire formulation étant « Le Français est attaché à … ». Chaque sondage est décrit et commenté en ces termes.

Les statistiques sont basées sur la théorie mathématique des probabilités. Il s’agit d’une démarche scientifique. Mais leur interprétation donne lieu à des abus de langage, et à de véritables mensonges scientifiques.

Tout le monde comprend que si on rencontre deux imbéciles dans une communauté, cela ne prouve pas qu’il y en ait plus qu’ailleurs dans cette communauté. Mais tout le monde admet que si une forte proportion de gens de cette communauté croient que la terre est plate, on considère que tous sont des crétins.

L’abus de langage consiste donc en premier lieu dans la généralisation des résultats, en appliquant une majorité de valeurs mesurées à l’ensemble de la population concernée. Mais quand la proportion de l’échantillonnage est élevée, les statisticiens eux mêmes n’hésitent pas à simplifier leurs résultats. Or si « l’écrasante majorité » des individus de l’échantillonnage avaient la meme réponse, cela ne signifierait pas que tous les individus de cette population auraient cette même réponse. Cela signifierait que la probabilité d’une réponse différente est extrêmement faible.

Mais un chiffre extrèmement petit peut avoir un poids évolutif immense : c’est le principe du taux de mutation des êtres vivants. Celui ci serait compris entre un sur dix mille et un sur cent millions, mais ce sont bien les mutations qui ont fait évoluer les espèces, aujourd’hui innombrables.

Bien sûr, la plus triste conséquence des généralisation statistiques n’est pas l’erreur de prédiction, mais le mépris, la discrimination qu’elles engendrent pour les populations décrites.

Enfin ces considérations seraient valables si les sondeurs étaient des gens honnêtes et de bonne foi, entraîné par la réthorique à des abus de langage et une déformation des faits. Mais les sondages et les statistiques, ainsi que la formulation non scientifique des résultats, sont souvent utilisées avec des arrières pensées de manipulation de l’opinion.

Les études scientifiques sont basées sur des hypothèses, parfois contradictoires, qu’il faut vérifier grâce à des mesures. Une étude digne de ce nom doit être critique avant tout sur ses propres hypothèses, pas seulement sur ses résultats. Quand on compare avec les sondages d’opinions, les sondés ont le choix entre des formulations trop simples, maladroites ou ambigües, qui bien souvent ne correspondent pas à la pensée de la personne sondée. La formulation des questions permet déjà de manipuler les résultats. Ensuite, une majorité relative de réponses convergentes permet d’énoncer une « tendance profonde de l’opinion ».

Les sondages sont un des outils de la démocratie les plus utilisés par ceux qui veulent amoindrir la liberté individuelle et augmenter le mépris et la haine. Méfions nous en, et quand nous utilisons les statistiques, n’exprimons que les faits précis, pas des généralisations abusives, avec des types sociologiques, dont forcément un groupe sera celui à abattre, à punir ou à détrousser.