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Une énergie nucleaire sans democratie

Le président de la république française vient d’annoncer (10/02/2022) la construction de 6 centrales nucléaires supplémentaires. Il ne s’agit pas d’un voeu pour son futur programme, mais bien d’une décision, alors que le « programme » sur lequel il a été élu n’en parlait pas. Il n’y a pas eu de consultation, de concertation, ni encore moins de vote, ni aux présidentielles, ni à l’assemblée nationale.

Ce déni de démocratie reprend les habitudes ininterrompues de nos anciens présidents de la république, depuis De Gaulle, sur la questions. Au départ, le secteur nucléaire était lié à la défense, à son secret et au fonctionnemnet jacobin de la prise de décision. Pourtant ce choix d’énergie engage la génération qui le finance et les 178 générations suivantes, qui vont payer des coûts imprévus répartis sur un demi-siècle (le secteur nucléaire est le premier en matière de dépassements de 1 à 10 !) augmenter les pollutions directes (le réchauffement de l’eau en particulier), augmenter la consommation d’eau (le nucléaire a des besoins un peu inférieurs mais du même ordre que l’agriculture : une bonne partie de l’eau quitransite dans une centrale repart en vapeur). Le risque d’incident existe toujours, et rien dans les évènements des 10 dernières années n’est de nature à nous rassurer. Un attentat sur une centrale est possible et pourrait avoir des conséquences incalculables. Enfin, depuis la privatisation d’EDF, l’Etat n’a plus les moyens de pérenniser un controle direct des centrales qu’il a payées. On ne forme plus d’ingénieurs fonctionnaires ayant la pratique de la construction, de l’entretien et de la gestion de ces centrales, on se contente de payer des couts énormes incontrolables.

La politique antérieure nous oblige déjà à considérer le nucléaire tel qu’il est : la première source actuelle d’énergie depuis des dizaines d’années en France, une réussite technologique globale remarquable, mais aussi un problème public énorme. Il faut continuer à mobiliser des cerveaux pour la recherche sur ce sujet, rendre à l’Etat sa compétence technique pour la gestion et le controle de l’outil.

Mais ca ne suffit pas : les troubles à l’environnement, à l’économie et les risques sur la sécurité et la santé dépassent largement le cadre de notre petite nation : comme l’a montré l’accident de Tchernobyl, le nucléaire a des conséquences sur tout un continent. La politique énergétique doit être revue le plus globalement possible. le gouvernement français actuel n’a aucune légitimité pour décider d’une augmentation de son parc nucléaire en augmentant la menace sur tout un continent.

Coupable mais pas responsable ?

En France, fin avril 2021, la justice vient de rendre une décision paradoxale. Un illuminé, islamiste, a tué une vieille dame parce qu’elle était juive. L’assassinat antisémite ne fait pas de doute, mais l’instruction s’est demandée pendant trois ans si l’assassin était responsable, car il était sous l’emprise du haschich. Tous les assassins ne le sont ils pas étymologiquement ? L’assassin a été considéré comme « coupable mais temporairement irresponsable », ce qui selon la loi française le dédouane d’une peine. Il sera néanmoins privé de liberté au sein d’un hôpital psychiatrique, mais la décision de « justice » sonne comme un appel au meurtre, un encouragement à toutes sortes d’excès.

En droit français, les « peines » ont plusieurs fonctions : punir le voleur, dissuader d’autres personnes de tenter les mêmes crimes et enfin protéger la société en isolant une personne dangereuse. Mais ces deux derniers objectifs sont complètement perdus de vue dans le fouillis inextricable de notre justice. Par contre, les juges appliquent scrupuleusement l’article de loi qui correspond au mieux au cas sur lequel ils doivent se prononcer, en oubliant l’esprit de la loi.

La fonction première des lois est de régler l’équilibre entre les libertés individuelles. C’est une fonction relative. Dans l’idéal, chaque cas devrait faire l’objet d’une réflexion profonde pour savoir quelle mesure devrait être prise vis à vis des personnes en cause pour qu’elles respectent davantage la liberté des autres. Pour limiter cette réflexion, les sociétés humaines ont édictés des commandements, des interdits, au départ assez limités puis de plus en plus en nombreux et stupides. Entre le « tu ne tueras point » biblique et l’interdiction d’acheter un vibromasseur dans l’Etat de Georgie, il y a une merveilleuse évolution…

Pourtant, même l’interdiction du meurtre est discutable et discutée. S’il s’agit de tuer son frère dont on est jaloux, le monde entier est d’accord pour condamner Caïn, même si Dieu ne lui inflige comme peine sur terre que son propre remords. Mais tuer quelqu’un qui cherche à vous tuer, cela semble beaucoup plus acceptable. Le droit français, pour les agressions entre individus, précise que la légitime défense doit être immédiate et proportionnée. Ces deux conditions sont les mêmes en droit international pour les conflits entre nations. Ces deux conditions, immédiateté et proportionnalité de la riposte à une attaque, méritent à chaque cas une appréciation et une interprétation.

Les lois ne sauraient se limiter à une application automatique d’une liste d’interdits. Le système pénal qui prétend être une justice absolue (à un interdit correspond une peine) n’est ni juste ni efficace. Pourquoi condamner plus durement quelqu’un qui a tué sa femme sur un coup de colère, qu’un élu de la république qui a été corrompu ou même qui a simplement menti à ses électeurs ? Et, dans l’actualité, pourquoi ne pas condamner un assassin, sous prétexte qu’il n’était plus maitre de lui au moment des faits ? Pourquoi laisser des personnes des politiques, des religieux, appeler à la haine, justifier des assassinats et des guerres ? Les personnes les plus dangereuses peuvent être laissées ou remises en liberté au bout d’un temps fixé arbitrairement, sans considération actualisée du risque.

Les lois doivent être complètement repensées, simplifiées pour en garder l’esprit et le but. En particulier, toutes les lois qui visent à éviter la violence, doivent entraîner une politique de prévention.

Cette prévention consiste d’abord à éduquer les enfants et expliquer à tous les citoyens qu’il doivent respecter la vie de leurs frères humains, mais aussi la vie sous toutes ses formes. Cette instruction doit s’accompagner d’une aide pour faire face aux difficultés matérielles qui poussent à la haine.

Le deuxième point de la prévention est d’empêcher la propagation des discours haineux, appelant au mépris d’une catégorie d’humains et justifiant des actes de violence. Cela nécessite un premier niveau de répression vis à vis des personnes ou des groupes qui nient l’égalité des êtres humains. Cette répression est subordonnée à l’objectif de prévention, et est limitée à la suppression du trouble (fermeture d’une salle de réunion, interdiction d’une publication, dissolution d’une association).

Le troisième point vise à limiter la liberté des individus qui sont susceptibles de commettre un acte de violence. Le fait d’avoir commis un acte criminel est une présomption, qui doit pousser la société à prendre des mesures fortes pour prévenir une récidive. Il s’agit d’une répression à but préventif et non punitif. On ne punit pas un homme pour son passé on limite sa liberté pour l’avenir. Cette limite doit être proportionnée au risque : surveillance, emprisonnement… Si un assassin doit être mis en prison ce n’est pas pour le crime qu’il a commis mais pour celui qu’il pourrait commettre. Pour que la privation de liberté soit limitée au minimum, la surveillance et l’emprisonnement doivent se doubler de mesures éducatives, permettant une éventuelle réinsertion.

La répression judiciaire est une légitime défense et doit suivre la même logique. La peine de mort est envisageable si c’est la seule méthode pour éviter la récidive, dans une société désorganisée par la guerre, ou dans l’urgence de l’action : un policier qui défend les victimes d’une aggression peut tirer sur l’aggresseur armé. Une société capable d’emprisonner aussi longtemps qu’il le faudra quelqu’un de dangereux n’a pas à le supprimer.

Dans ce nouvel esprit, l’assassin de Sarah Halimi aurait du être repéré avant l’assassinat pour les opinions qu’ils professait librement. Avec les fanatiques religieux qui l’ont influencé, il aurait du être soumis à de premières mesures de privations de liberté. Si malgré tout, on n’avait pas pu empêcher le crime, on aurait du le mettre en prison pour tout le temps qu’aurait duré sa vraie folie, qui était l’antisémitisme.

Les plus grands criminels de l’histoire, Napoléon, Hitler, Mao, Staline, Pol Pot, responsables de millions de morts, étaient indiscutablement fous, mégalomanes et paranoïaques. Il aurait bien fallu les juger, les condamner, les emprisonner, peut être même les tuer, pour les empêcher de nuire.

Considérer les fous comme toujours irresponsables est une erreur fondamentale. Le crime d’un fou, sous l’emprise d’une drogue ou de l’alcool, ou simplement de la colère ou de la passion, n’est pas moins grave que celui d’une personne ayant tout calculé froidement. Un fou n’est irresponsable que lorsque cette absence de maîtrise de soi a déjà été constatée et prise en compte par la société. Toute personne considérée comme un citoyen, et agissant en toute liberté, est responsable de ses actes. On n’est irresponsable que si quelqu’un d’autre assume la responsabilité de vos actes : les parents des enfants, les tuteurs d’un vieillard sénile, les surveillants d’une personne considérée comme dangereuse.

Il y a 150 ans, la commune expérimentait la démocratie directe.

La cinquième république française, basée sur la domination d’un président, certes élu au suffrage universel, mais avec tous les pouvoirs pour cinq ans, rechigne à célébrer une des révolutions les plus originales et les plus importantes de l’histoire. Bien sûr, le gouvernement actuel est de droite, et se réclame sans doute plus d’Adolphe Thiers, dont le préfet Lallement parait un émule tardif et médiocre. De plus, depuis 150 ans, on déforme l’histoire de la commune, en parlant de ses crimes, en oubliant la lâcheté puis la haine terrible de l’armée et du gouvernement, à majorité monarchiste (!) du début de la troisième république.

Parmi les premiers réviseurs de l’histoire, Emile Zola, contribuera aux mythe d’un mouvement destructeur, avec ses « pétroleuses » alors que le conseil de la commune s’est positionné contre la capitulation et pour la justice sociale. Les articles de Zola ont été publiés dans un recueil intitulé « la république en marche« . Il est cohérent que le président actuel se place du coté des versaillais, du côté de l’élite qui avait fui devant la populace. Adolphe Thiers cédant aux prussiens plutôt que de recréer une armée et une résistance populaire est le prototype de Pétain, qui préfère l’ordre nazi à la chienlit communiste et la résistance. Notre actuel président n’a pas eu encore, heureusement, l’occasion de montrer de telles capacités d’adaptation.

Des dizaines de miliers d’exécutions sommaires d’hommes de femmes et d’enfants ont été perpétrées par les versaillais, contre quelques centaines d’assassinats, commis pour la plupart sans avoir été décidés par le conseil de la commune. Si certains monuiments l’ont été volontairement détruits par les communards, comme des symboles d’oppression, en particulier la colonne Vendome et le palais des Tuileries, la plupart des destructions matérielles dans le Paris en ruine de mai 1871 étaient dues aux bombardements prussiens puis versaillais.

Mais en ne retenant que les violences, on oublie surtout le principal : la Commune de Paris a été l’occasion d’essayer toute une série d’améliorations de la démocratie : placer les élections comme un préalable à toute action, donner tous leurs droits et toute leur place aux femmes, et mettre en place un mandat impératif pour les élus, qui pouvaient être révoqués par le peuple qui les avaient élus.

Renvoyons aux sites plus historiques, pour tous les autres aspects, mais arrêtons nous sur cette proposition, tout à fait d’actualité : plutôt que d’élire des représentants, sur la base de promesses qu’ils ne tiendront pas, élisons des députés chargés strictement de mettre en oeuvre le programme pour lequel ils ont été élus. C’était une idée de Jean Jacques Rousseau, qui n’a été que très rarement été tentée dans l’histoire. Mais aujourd’hui, les moyens de la démocratie participative sont bien plus importants :

En premier lieu, on peut constituer des plates formes programmatiques, avec une coconstruction élargie à tous les sympathisants des idées proposées. Internet et l’informatique, permettent sur la base d’un premier texte, de recueillir des contributions, de faire des synthèses, de noter l’historique des modifications, avec un nombre très important de contributeurs. Wikipedia en est un exemple.

En second lieu, la mise en oeuvre peut faire l’objet d’adaptations sur la base de consultations rapides étendues à toute la population concernée.

Les moyens impératifs de cette méthode démocratique sont l’éducation et l’information préalable de la population lui donnant les moyens de comprendre les sujets à discuter, la formation aux moyens informatiques, et le contrôle par des fonctionnaires réellement indépendants des procédures, pour éviter toute malhonnêteté.

L’honnêteté des citoyens et de ses représentants est indispensable à la démocratie. Cette honnêteté ne sera effective que lorsque tous les enfants y seront incités par l’exemple de leur entourage ; elle ne sera garantie qu’avec une police au service de la république et de ses principes et non aux ordres d’un dirigeant particulier.

L’histoire ne nous determine pas, elle nous apprend seulement.

Depuis l’invention de l’écriture, l’homme conserve les histoires qu’il raconte, les fictions, comme les récits ou les essais. La mémoire du monde est comprise principalement dans des livres, mais aussi des musées, des monuments et est enseignée aux enfants pour les aider à devenir des citoyens.

Les récits historiques sont déformés par chaque société, dans un but particulier. L’histoire racontée par les juifs, les chrétiens ou les musulmans, reprenant les textes sacrés, mais orientant également la vision de tous les évènements qui ont suivi, cherche à montrer le destin de l’homme, du peuple élu, de la communauté des croyants. L’histoire enseignée du moyen âge au XIXème siècle montrait le destin des rois, des dirigeants et de leurs familles, comme des élus de dieu, améliorant sans cesse leur patrimoine et luttant plus ou moins efficacements contre leurs ennemis, c’est à dire leur voisins. Même les défaites sont magnifiées dans des récits transformant les pauvres guerriers massacrés en des héros immortels, comme Roland ou Bayard. L’histoire chinoise insiste sur l’unification de l’empire chinois et son maintien, contre vents et marées, mongols et européens, grâce à la puissance de ces empereurs implacables. C’est grâce à cette perspective historique que l’Etat du monde le plus peuplé maintient encore cette unité servile sous la dictature du parti communiste.

A partir du XIXème siècle, on a créé les romans nationaux, permettant aux italiens de se croire les petits-enfants de César, aux français de se considérer comme les descendants de Vercingétorix, résistant aux romains, aux allemands de se figurer être du sang d’Arminius/Hermann, ayant repoussé les légions romaines. Les positivistes, les scientistes, les progressistes ont montré comment les lumières de la république et de la civilisation allaient pouvoir s’étendre au monde entier grâce aux conquêtes des hommes supérieurs : les espagnols sur les Aztèques, les anglo saxons sur les indiens ou les aborigènes, les français sur les indigènes d’Afrique ou d’Indochine. L’histoire communiste russe a montré comment les merveilleux dirigeants et les héros du partis avaient sauvé le peuple des attaques des capitalistes ou des fascistes. Cette propagande ridicule, mais voulant donner un sens à l’histoire, a longtemps clamé que le socialisme allait dépasser le capitalisme dans tous les domaines.

L’histoire a toujours été enseignée, en déformant les faits, pour montrer le progrès réalisé suivant la conception du monde de la caste dominante, formatant les enseignants. Les enfants ont pu, grâce à cet enseignements se satisfaire de leur condition sociale, de leur pays et rester dociles, pour être de vaillants soldats ou des mères courage.

D’autres visions de l’histoire ont existé, comme la vision cyclique : une civilisation nait, fleurit, atteint son apogée, connait une décadence et est remplacée par une autre. Cette vision moins optimiste a moins de succès, sauf auprès des vieux philosophes…

Les historiens d’aujourd’hui s’attachent plus aux faits et à leur succession. Ils séparent généralement les enchainements chronologique d’un essai d’interprétation. Les interprétations des cinquante dernières années insistent beaucoup sur les conditions environnementales et démographiques, diminuant l’importance des héros. Cet effort d’objectivité est à saluer. Il est facilité par les échanges beaucoup plus importants d’informations, rendus possibles par la technologie. Les tentatives de réécriture dans les pays soumis à une dictature se heurtent généralement à la vitalité de la communauté scientifique, médiatique et militante mondiale, qui permettent de dénoncer les mensonges ou les déformations, en recoupant avec d’autres informations. Pour le moment, il s’agit bien d’un progrès, mais celui ci pourrait être anéanti par un big brother simplifiant les évènements, en écartant certains faits, ou noyant les facteurs déterminants dans un flot d’informations.

Lorsque l’on suit l’incroyable succession de l’histoire humaine, depuis 2000 ans au moins, ce qui frappe c’est davantage le chaos que le progrès. Néanmoins, dire que les hommes sont des marionnettes soumis à des dirigeants les manipulant, ou façonnés par les cironstances naturelles et sociales, serait aussi faux que des les croire téléguidés dans chacun de leurs gestes par la volonté d’un dieu fou.

Les hommes sont libres, et cela vaut pour chacun d’entre eux. Les sociétés ont pu faire agir momentanément de façon cohérente de grands groupes, mais les castes ou les peuples ainsi constitués ont régulièrement éclatés en morceaux, par des révoltes en réponse aux injustices à l’intérieur de ces sociétés ou par l’invasion de voisins jaloux. La liberté individuelle permet de choisir son chemin. La société contingente où l’on vit, vous pousse dans une direction, mais lorsque vous choisissez un autre chemin, si vous arrivez à convaincre suffisamment de personnes de vous accompagner sur ce chemin plus juste, la liberté et la volonté d’un groupe permet de renverser le déterminisme social.

Les récits historiques sont bien nécessaires à la constitution de cerveaux citoyens. Mais il faut toujours les regarder selon le prisme universel de la liberté et de l’égalité, de la solidarité et de la justice. L’injustice ne perdure jamais sur un peuple qu’avec son consentement inconscient. Certaines sociétés peuvent renaitre plus justes d’une révolution, comme l’ont été toutes les démocraties occidentales crées après les royaumes. Mais cet effort de justice a toujours été insuffisant. Cultiver l’idée de liberté a rendu encore plus difficile l’équilibrage de ces forces individuelles innombrables. Les sociétés démocratiques sont donc instables et fragiles. Nous ne vivons pas sur un plateau d’altitude, nous sommes sur une pente : si nous ne nous améliorons pas, nous retombons. Et les citoyens effrayés par leur propre liberté, autant que par celle de leurs voisins qu’ils prennent toujours pour des ennemis, aspirent alors à une nouvelle dictature, où ils auraient le confort de l’esclave bien nourri.

L’histoire ne doit pas être enseignée, sans qu’on réfléchisse à ces questions : combien de temps peut on supporter une paix sans justice ? y a-t-il d’autres solution que la guerre pour combattre l’injustice ? L’histoire nous aidera à y répondre, grâce à l’étude du passé, mais n’apportera aucune certitude sur notre futur. L’avenir reste entre nos quatorze milliards de mains.

Honnêteté

Un homme ou une femme honnête, ce n’est pas quelqu’un qui mène sa vie comme les autres en évitant les excès. C’est un être humain conscient de ses propres faiblesses, qui est même capable de les reconnaitre devant n’importe qui, mais qui a compris qu’il valait autant que les autres, ni plus ni moins, que personne ne devait décider pour lui ; il s’est ainsi donné des valeurs de liberté et d’égalité. L’honnête homme, chaque fois qu’il doit faire un choix aux moments importants de sa vie, continue à décider en fonction de sa propre conception de la justice et de ses aspirations .

Mais la plupart d’entre nous ne sommes pas assez honnêtes. On vit, comme les autres, et surtout on évite de se poser des questions sur sa propre trajectoire.

Ceux qui vivent dans une riche démocratie se contentent de trier leurs déchets et de voter pour le moins mauvais des candidats au second tour. Et quand on entend quelqu’un parler d’ouvrir les frontières des pays riches aux malheureux, d’arrêter des industries polluantes ou dangereuses (dans cette catégorie, vous pouvez mettre l’armement et le nucléaire !), on se moque de ces pauvres utopistes. Soyons réalistes, qui voudrait abandonner son propre confort, fut il relatif ? personne ? donc surtout pas moi.

Ceux qui vivent dans un pays pauvre, veulent surtout la paix, fut ce au prix de la liberté. L’idéal… c’est un dictateur ou une caste dirigeante assez forte pour maintenir l’ordre, mais pas trop fou, ne massacrant personne dans les rues, mais ayant la décence d’enlever discrètement les opposants et de les torturer ou les assassiner sans bruit.

La majorité des pauvres et des riches se sont un jour posé des questions. Ils se mettent des oeillères, mais inconsciemment se sentent coupables. Ils accueillent donc avec envie, enthousiasme les super-menteurs, comme Trump, Bolsonaro, Le Pen : les hommes politiques forts, qui n’hésitent pas à faire des promesses simples, qui laissent entendre que les problèmes viennent seulement des étrangers et qu’ils seront simplement règlés avec de la discipline, de la fermeté, peut-être même une « bonne guerre ». Bientôt, grâce à nos super-héros menteurs, plus de problème, et pour l’instant de l’ordre et un minimum de confort matériel. Les petits malhonnêtes du quotidien adorent les grands malhonnêtes, qui osent et réussissent, grâce à cette complicité. C’est le fallacieux confort moral du mensonge, qui enfouit les remords sous de bonnes excuses et de mauvaises raisons, qui souvent engendre la haine et la violence, seuls exutoires possible à ce déséquilibre mental.

L’homme et la femme honnêtes n’agissent pas seulement suivant leur conscience « du moment », mais suivant des valeurs qu’ils ont fixé à la fin de leur adolescence, conformément à l’exercice continu de leur raison, leur véritable conscience, et qu’ils s’efforcent de respecter. C’est un courage que très peu exercent…

Pourquoi La république universelle est charlie…

Les islamistes sont furieux de voir que leurs assassins (le terme vient précisément du premier terrorisme islamiste de l’histoire) ne suffisent pas à faire taire ceux qui veulent continuer à rire des religions, et même de Dieu. Cela devrait réjouir tous les démocrates, mais ce n’est pas le cas. Beaucoup d’intellectuels ont rejoint le camp des assassins décérébrés.

Leurs arguments, quand ils sont conçus de manière à peu près cohérente, ce qui est loin d’être toujours le cas, sont les suivants : 1. la bible et le coran interdisent les représentations de dieu, 2. se moquer de Dieu ou de ses représentants est un manque de respect des croyants, 3. ces actes doivent être interdits par la loi des hommes 4. si les blasphémateurs ne sont pas punis par la loi, les vrais croyants doivent les punir

Ce raisonnement est un sophisme complet.

En premier lieu, l’interdiction de la Bible porte sur les idoles : les images gravées d’un dieu qui n’existe pas, la superstition qui entoure les sculpltures et les images, détournent les hommes de la recherche du vrai dieu, qui n’est pas un veau d’or. C’est ce sens qui est repris dans le Coran : il faut lutter contre le polytheisme, qui éloigne les hommes du vrai et seul Dieu. Les iconoclastes de plusieurs religions ont ainsi détruit par la violence les images faites par des croyants qui cherchaient à représenter leur propre quête de Dieu. Ce n’est évidemment pas Dieu qui est offensé par sa représentation maladroite… Si une représentation du monde vous déplait, êtes vous obligé de la regarder, d’y souscrire, de la regarder ? Pour tous ceux qui croient à la liberté on peut désapprouver le culte des idoles des autres, mais cela ne justifie pas la violence directe, la destruction des églises, des statues l’extermination ceux qui n’ont pas la même religion. La bible et le coran, dans certains passages, poussent à l’anathème, au massacre des incroyants, de leurs femmes et de leurs enfants. Ces passages des textes saints historiques sont contredits par d’autres passages des mêmes livres qui montrent un dieu patient et miséricoridieux, qui pousse au pardon, soixante-dix fois sept fois s’il le faut, qui appellent les incroyants à la conversion et les croyants à la compréhension. Cela montre qu’une lecture à la lettre des textes saints est incompatible avec les principes universels qui lorsqu’ils sont établis entre les hommes leur permettent de vivre en paix : la liberté et l’égalité. La paix nécessite le respect de la pensée de l’autre.

En second lieu, il faut précisément voir ce que signifient le respect de la pensée de l’autre et se moquer de quelqu’un. Le respect, c’est avant tout la considération : je sais que tu existes, comme moi j’existe ; c’est ensuite l’égalité : tu as la même liberté que moi. On peut, on doit même, faire des reproches à quelqu’un qu’on respecte. Celui qu’on ne respecte pas, on le méprise, on nie son existence ou on le hait et on souhaite la fin de cette existence qui nous gêne. Or se moquer de quelqu’un, ce n’est pas le mépriser ou l’ignorer. Se moquer, c’est considérer quelqu’un, sentir les contradictions qui existent entre son discours, son apparence et exprimer ce décalage d’une façon qui fasse percevoir d’un coup cette distance à tous les autres, mais aussi à cette personne en particulier. Par exemple : tu t’habilles bien pour faire une bonne impression, mais tu as une tâche de tomate sur te chemise ; tu crois en un dieu d’amour, mais tu souhaites la mort des incroyants. Voila des moqueries, souvent assez drôles, qui peuvent faire réfléchir les personnes à qui elles s’adressent. Si le moqueur pense que le moqué peut comprendre et s’améliorer, la moquerie est gentille. s’il pense que l’objet de sa moquerie est indécrottable, la moquerie est méchante. Mais, même dans ce cas, le moqueur considère toujours l’homme dont il se moque comme son égal, lui qui partage sa condition d’homme faillible. C’est pour cela qu’on rit : parce qu’on se sent à la fois très proche de celui dont on se moque et très loin, grâce à la prise de conscience instantanée, surprenante, de l’humour. Cette supériorité morale du rieur sur le ridicule n’est que momentanée, elle part justement de la considération de l’autre comme son égal, même si on lui est supérieur, sur le point du ridicule. On ne se moque que de ceux qu’on respecte. Ceux qu’on ne respecte pas, on les méprise ou on les hait, ce qui est complètement différent. La haine pousse à la violence physique, ou à l’insulte. Une véritable insulte cherche réduire quelqu’un (tu es un chien), alors qu’une moquerie cherche à faire comprendre que la conduite d’untel le réduit et qu’il doit se corriger (tu aboies comme un chien).

Ensuite vient la question de l’interdiction : les interdits de la bible ou du coran doivent ils être dans la loi des hommes ? Pour une bonne partie des croyants, ces interdits s’adressent à eux et non aux incroyants. Si on croit en Dieu, on peut imaginer qu’il apprécie le sacrifice volontaire de quelqu’un qui l’aime, mais comment pourrait il apprécier le sacrifice de quelqu’un qui serait obligé de le faire ? La liberté individuelle est compatible avec la croyance en dieu, mais incompatible avec des interdits religieux qui seraient des obligations civiles, garanties par la force des hommes. La république universelle, que tous les chercheurs de paix appellent de leur voeux, doit considérer chaque homme qu’il soit athée ou croyant comme égal à ses yeux. Elle ne peut interdire à un athée, ou à quiconque, de ne pas suivre un précepte d’une des milliers de religions connues, dans la mesure où il n’exerce aucune violence sur les autres. Or la moquerie, l’art et la caricature ne sont pas des violences : ils ne sont pas fondés sur la haine, mais sur la prise de conscience et la volonté de partage de cette prise de conscience. Ils peuvent engendrer une certaine douleur momentanée chez certaines personnes : un spectateur peut souffrir en compatissant à la représentation de la douleur d’un autre, une personne caricaturée peut s’attrister de son propre ridicule. Mais cette douleur momentanée n’est pas souhaitée comme telle par l’artiste ou le moqueur, ce qu’il désire chez l’autre, après cette distanciation rapide, apportant une douleur éventuelle, c’est le partage d’une autre réalité et une réaction positive. La république doit garantir toutes les formes d’expression qui ne poussent pas à la haine. Rire des islamistes, des terroristes et des tyrans ne pousse pas à vouloir les exterminer, mais vise à diminuer leur pouvoir, en anéantissant momentanément la peur qu’ils pourraient nous inspirer. Se moquer d’eux nous empêche de les haïr et nous aide à combattre justement leurs injustices.

Enfin, un croyant qui voudrait punir par la mort ou l’emprisonnement un rieur, parce qu’il ne le respecte pas, emploie un couteau ou un fusil automatique pour se venger de quelqu’un qui n’utilise que sa plume et son humour. Cette punition, si elle était légitime n’est pas proportionnée à la faute. Mais surtout, la vengeance n’est jamais légitime. Le désir de riposte immédiate est naturel, il se confond avec la survie, c’est une légitime défense. Cette riposte est légitime si elle est immédiate et proportionnée. Quand on refuse de se confronter avec les mêmes armes que l’adversaire, c’est disproportionné et lâche. Le courage du violent, qui accepte la mort finale n’efface pas ses premières lâchetés. La vengeance intervient après un long temps. Elle prend sa source dans la haine, pas dans la justice. Elle ne cherche pas à empêcher de nuire, mais à punir, comme si le vengeur souhaitait prendre la place de la justice de hommes, organisée par la société où il vit, ou la place de Dieu. Or Dieu, s’il existe, n’a pas besoin du bras d’un homme pour se faire justice. S’il est amour, il ne peut que pleurer devant tant de haine. Ce sont les islamistes qui ne respectent pas ce Dieu auquel ils croient, en appelant au meurtre des blasphémateurs ils nient sa puissance et son amour universel.

Nous sommes tous très proches : les esclavagistes les nazis les terroristes étaient proches de leurs victimes, mais refusaient de le voir. Les humoristes, les caricaturistes, eux, se savent les égaux des êtres humains dont ils dévoilent les ridicules. Charlie est un journal qui défend, comme il l’a toujours fait, l’universalité humaine : celle de la liberté d’expression, de l’humour fraternel. Cette universalité est incompatible avec le nationalisme, l’extrémisme religieux et le communautarisme. C’est pour cela que ces déviances humaines, tellement humaines et risibles, doivent continuer à être tournées en ridicule.

La souveraineté est un mauvais argument

La souveraineté est invoquée ces derniers temps, par les intellectuels de droite et de gauche pour « défendre nos valeurs » et lutter contre les délocalisations sauvages de l’ultralibéralisme.

Or le concept de souveraineté est celui-ci : les nations font ce qu’elles veulent chez elles, elles n’ont pas à se justifier pour imposer ce qu’elles souhaitent sur le territoire… Ce raisonnement se rapproche de celui de chaque individu, qui souhaite pouvoir faire ce qu’il veut chez lui et se justifie par la liberté fondamentale. Mais comme chaque fois qu’on individualise un collectif, on déforme la vérité et on fausse l’argumentation.

C’est le concept de souveraineté qui a ruiné l’internationalisme : les lois d’un pays ayant plus de poids que les universels droits de l’homme, la paix n’a jamais pu être obtenue par la Société des Nations ou l’Organisation des Nations Unies.

Si les déolocalisations constituent une injustice, si importer des produits de Chine est un mal qu’il faut supprimer, ce n’est pas au nom de la souveraineté de la Frrrance, ou des USA, mais au nom de valeurs universelles : en Chine, comme dans beaucoup d’autres pays pauvres, règne une dictature ; les grandes entreprises y sont dirigées par d’anciens dirigeants du parti communiste au pouvoir, les employés n’y ont pas de droits syndicaux ; la nature y est sacrifiée au développement, même si la tendance s’infléchit un peu, compte tenu des dommages directs des pollutions.

Il faut refuser d’acheter des produits venant de dictature, ou construit sans respect de la nature et de l’équité, qu’ils viennent de Chine, du Brésil ou même d’Europe ! Ce n’est pas facile pour un individu : la plupart des vètements, des ordinateurs, des matériaux viennent de tels pays ; les autres produits sont plus chers. Mais cela doit au moins nous conduire à limiter ces achats et cibler les filières respectueuse de la nature et des droits de l’homme. Cela doit être clarifié dans les principes des démocraties : le protectionnisme et le souverainisme sont des attitudes primaires : il faut échanger avec ses voisins, en particulier tous les produits qu’ils peuvent faire, du fait de la spécificité de leur terroir et de leur culture, et qu’il nous est difficile de réaliser. Ne refusons pas les importations pour des raisons nationalistes, mais pour des raisons universelles.

Les démocraties doivent clairement refuser d’importer des produits fabriqués sans respect des droits de l’homme et de la nature. Ils doivent eux mêmes les produire ou les remplacer. ils doivent également ouvrir leurs frontières aux habitants de ces pays qui souhaitent ne plus vivre en dictature.

Mourir de maladie est il si grave ?

A titre individuel, ce qui est le plus important, n’est pas d’éloigner ou de ralentir une mort inéluctable, mais de bien remplir sa vie et celle de ces proches d’amour et de bonheur et de faire œuvre utile au monde. Mais c’est le devoir de chacun d’éviter toute mort prématurée, qui empêcherait justement de remplir sa vie. C’est pour cela qu’il est capital de protéger ses enfants, d’éviter les accidents et de soigner les malades. Mais l’exercice de la médecine, fait l’objet de débats légitimes, notamment quand on applique des traitements douloureux à des personnes dont la durée naturelle de vie est limitée.

Au niveau d’une population, des choix sont faits, le plus souvent de manière non explicite, pour économiser l’effort de soins vis à vis des personnes à durée de vie limitée. En Europe, on consacre des milliards à augmenter la vie en mauvaise santé de personnes à bon niveau de revenu, mais les services d’urgence demandent l’âge des malades et ne se déplacent que rarement pour les plus vieux. Dans les pays pauvres, l’effort pourrait être concentré sur les plus jeunes, mais les moyens manquent déjà pour une prévention sanitaire de base. L’effort est concentré sur les riches privilégiés. Près d’un quart de l’humanité n’a pas accès à l’eau potable et l’assainissement, on dénombre 100 000 morts du choléra. On sait qu’une augmentation des moyens financiers réservés à la prévention sanitaire diminuerait les accidents et les maladies, et pas seulement dans les pays pauvres. La réduction des moyens hospitaliers en France, ces dernières années, s’est faite pour des motifs économiques assumés, et visiblement partagés par une population qui vote pour des gouvernements du centre gauche à centre droit qui pratiquent plus ou moins l’austérité budgétaire depuis plus de 30 ans.

D’autre part la démographie est elle aussi un sujet philosophique et politique essentiel : la surpopulation est un des facteurs les plus importants du déséquilibre écologique et politique de la planète. Mais chaque enfant à naître ne pourrait-il vivre une vie formidable ? De nouveaux petits Mozarts, Pasteurs ou Mandelas ne sont-ils pas empêchés de vivre par les politiques qui limitent volontairement la démographie ? Si en France nous sommes loin de la surpopulation, la planète l’est globalement. Et la France refuse d’accueillir de nouveaux migrants, qu’on laisse mourir ou survivre dans des conditions atroces, internés dans des camps… Le taux de mortalité d’une pandémie n’est il pas une solution pour  » faire de la place  » ? Ce moyen n’est il pas moins injuste que la politique de l’enfant unique en Chine, l’avortement des embryons féminins, la fermeture des frontières aux réfugiés ? Néanmoins, ce sont quand même dans les groupes de populations les plus pauvres qu’on trouvera le plus de décès dus à l’épidémie. En Afrique, la grippe au COVID-19 va s’ajouter au SIDA, à la tuberculose et à la malnutrition et entraînera forcément des ravages, qui ne viennent que de commencer. Il faut bien sûr lutter contre cette pandémie.

Mais le COVID-19 a entraîné dans tous les pays riches, pour la première fois dans l’histoire, des mesures exceptionnelles concernant la totalité de la population et créé une psychose comparable à un temps de guerre, alors que les dommages subis sont ridiculement faibles par rapport à la situation des pays en guerre ou des camps de réfugiés politiques, climatiques et économiques. La première question que l’on peut se poser est donc « le confinement généralisé est-il une mesure proportionnée aux risques de l’épidémie?« .

Il a été dit et répété, pendant les premiers mois, que cette grippe n’était dangereuse que pour une minorité de la population, les plus vieux et les plus fragiles. Mais depuis, de nombreux cas sont venus montrer que l’épidémie pouvait concerner aussi des adultes en bonne santé, mais cela reste vrai statistiquement. Les mesures les plus immédiates devaient donc être ciblées sur les personnes fragiles, pour les obliger à rester chez eux, en organisant leur approvisionnement et leur visite. Les soignants et les aidants, en général déjà formés à ces mesures, devaient être dotés de masques de protection et de gel : c’était d’ailleurs le cas dans bien des structures, qui l’avaient anticipé pour la grippe ordinaire, mais ce n’était pas le cas de la majorité des établissements de santé, du fait de l’incurie de certains et de la pénurie générale de moyens. Pour le reste de la population, on avait le choix entre, a minima, une sensibilisation à la distanciation sociale et le confinement généralisé. C’est cette solution ultime à laquelle nos gouvernements sont arrivés, assez rapidement, alors que le nombre de morts était encore très inférieur à celui des accidents de la route.

La motivation sanitaire, d’après les épidémiologistes, est de ralentir l’avancée de l’épidémie, pour que les hopitaux ne soient pas trop saturés. Sans confinement, le nombre de personnes atteintes est très vite atteint. Mais aucun expert ne peut assurer que le confinement va diminuer la hauteur du palier. Le temps de « rattrapage » de la courbe n’est pas bien estimé, il varie selon le virus et les pratiques de la population avant et pendant le confinement.

Une autre stratégie était possible, avec la théorie de l’immunité collective, que les Pays-bas et la Grande Bretagne avaient un temps adoptée, que la Suède soutient toujours, avec pour le moment, moins de morts, proportionnellement à sa population, qu’en France. Ne faut il pas que nous soyons globalement exposés aux différents virus pour que notre population apprenne à résister ? Ce processus évolutif élimine ceux qui ne s’adaptent pas. Quoiqu’il en soit, dans les pays confinés, la maladie progresse toujours ; l’exemple de la Chine laisse espérer qu’elle atteindra un plateau et diminuera, mais en quoi le confinement a t il vraiment aidé à atteindre ce palier ? Ces mesures empêchent la propagation, mais rien ne tue le virus : ne reviendra-t-il pas dés la levée des mesures ? Si on doit faire feu de tout bois, utiliser toutes les solutions, pourquoi hésiter à produire la nivaquine, médicament peu cher, et à l’administrer sous surveillance médicale ? Serait-ce parce que les industriels y gagneraient moins qu’avec un nouveau médicament ? Les contre-indications ? Le confinement généralisé a bien plus de contre-indications sanitaires et sociales: les personnes isolées, par leur handicap ou leur situation familiale sont déprimées, l’arrêt de travail forcé risque de faire perdre leur emploi à des milliers de personnes, dont la détresse psychologique va augmenter avec l’impossibilité de chercher un emploi durant le confinement ; les stages de fin d’étude sont arrêtés au beau milieu, les étudiants ont encore moins d’espérance pour leur premier emploi, les médecins et les hôpitaux reçoivent beaucoup moins de patients pour d’autres cause que la pandémie, ce qui diminue la prévention d’autres maladies. Les vieux meurent seuls, sans le soutien de leur famille, cloîtrés dans leur chambre d’hospice. Les vagabonds, les migrants sont encore plus rejetés et exclus.

Une bonne partie des mesures prises n’est pas efficace. Par rapport aux arrêtés sécheresse pris chaque année par les préfectures de France, cadrés par une série de textes, aux impacts évalués et discutés par de nombreux comités d’usagers, les mesures sanitaires semblent avoir été décidées par un sous préfet parisien, tout juste sorti de l’école nationale d’administration. Pourquoi, les 10 premiers jours ne pouvait on se promener à deux du même foyer ? Que risquent vraiment des randonneurs pour qu’on leur interdise la nature, en respectant les distances de sécurité, alors qu’ils peuvent se faire infecter en retournant chercher quatre fois dans la même journée des nouilles et du papier hygiénique au supermarché ? Pourquoi ne pas être plus explicite et cohérent sur la distance de sécurité à respecter avec les autres dans la rue les transports ou les magasins ? Pourquoi ne pas définir clairement les mesures de diagnostic du virus, et les mesures à adopter en conséquences ? Actuellement, des personnes ayant partiellement les symptômes sont laissées chez elles ou dans leur établissement de soin, sans diagnostic précis ni aide adaptée. Si ces mesures qui limitent la liberté d’aller et de venir ne sont pas efficaces, elles sont donc abusives!

De plus, le cadrage légal de cette restriction abusive des libertés a été intégré à une loi, qui pourra être reprise ultérieurement, pour dans une période troublée, interdire tout rassemblement sous couvert de santé publique. La sécurité de la population a été clairement mise en dessous de la liberté des citoyens dans l’échelle des valeurs de la cinquième république française. Mais les expatriés du monde entier qui ont souhaité en grand nombre être rapatriés ont démontré, à leur corps défendant, combien les préjugés nationalistes étaient stupides : pourquoi réinfecter son pays si on est malade en Chine, alors que les chinois ont expérimenté les traitements adaptés ? Pourquoi quitter un pays d’Afrique où l’épidémie ne s’est pas dévelopée, pour rejoindre Paris où elle est virulente ? Nos vieilles démocraties sont en train de se racornir lentement dans l’égoïsme, la culpabilité et la haine.

Le confinement aura été efficace sur deux points inattendus : il a laissé le nombre de morts sur la route, et a fait diminuer la pollution. Mais pour diminuer les morts sur la route (3500 morts/an en France, un chiffre du même ordre que celui des morts dus au COVID-19) il n’était pas question d’arrêter l’économie. Obliger les gens à aller en train ou en transport en commun dans nos grandes villes contribuerait davantage à la santé publique que le confinement, et coûterait moins cher, pourtant, on refuse de l’envisager.

Le coût économique direct est déjà énorme, avec l’arrêt de l’activité de production pendant plus d’un mois, cela correspond au moins au 12ème du PIB des pays riches. Il faut comparer le coût de cette mesure de précaution destinée à éviter des milliers de morts, avec la possibilité d’en éviter des centaines de milliers en consacrant l’équivalent de ce coût à l’assainissement et l’eau potable ou à la mise en sécurité de pays dévastés par la guerre civile ? N’est il pas indécent de voir que le confinement a été décidé rapidement par des politiques poussés par les media, devant la peur de la population, et surtout la peur d’être mal jugés, alors que des mesures bien moins coûteuses mais bien plus efficace contre la mort et la souffrance sont bloquées par l’inertie internationale depuis 1945 ?

Les mesures économiques consistent à indemniser des pertes des entreprises dues à des interdictions et à prendre en charge le chômage induit. Le financement de ces mesures est prévu sur les budgets des États, avec un peu de solidarité inter-européenne. Il a été envisagé, puis repousser de diminuer les dividendes des actionnaires des sociétés à aider. Ces mesures sont prises à crédit. Les gouvernements seront encore plus aux mains des banquiers, pour tout le siècle à venir. La dette des pays est un scandale : un État doit tirer ses moyens du travail de ses citoyens et si nécessaire, prendre à ceux qui ont trop pour donner à ceux qui n’ont pas assez. C’est bien à la république d’estimer ce  » trop « . Or en préservant les richesses des privilégiés tout en obligeant la majorité des citoyens à arrêter leur travail légitime, les États qui ont choisi le confinement augmentent les injustices sociales.

Qu’aurait il fallu faire ? Mon propos n’est pas de considérer les gouvernants des nations du monde entier comme des incapables, ils cherchent de bonne foi à sauver des vies. Mais emportés par le système, ils n’ont pas forcément pris les meilleures décisions. S’il faut accepter des pertes humaines sur le front des maladies, il ne faut pas nous y résigner : notre société doit augmenter à l’amont les moyens des systèmes de santé et prédéfinir des protocoles cadres de gestion de crise. Ces protocoles doidnvent contenir les mesures sanitaires, mais aussi économiques et sociales, graduées suivant le niveau de crise et ces mesures doivent avoir été concertées avant la crise. Il faudra aussi doter chaque région des moyens d’assurer son autosuffisance, en cas de rupture des liens avec les autres régions. Cette politique de prévention sanitaire doit aller de pair avec un rééquilibrage des échanges économiques. Chaque région doit pouvoir survivre sur ses propres ressources et bien vivre grâce à des échanges équitables avec ses voisins. Il faudrait également mieux organiser le dépistage, la collaboration internationale des chercheurs et des autorités sanitaires, sensibiliser rapidement les populations à la distanciation, adopter une communication internationale transparente. Nous aurons d’autres pandémies, pas forcément avec cette configuration… Serons nous davantage préparés ? Tant que perdureront les politiques nationales contradictoires, les seuls accords se feront pour tolérer l’injustice. Le confinement a une énorme vertu : en arrêtant la société, il aura donné le temps à chacun de réfléchir à ses vraies valeurs.

Il reste maintenant à mettre en commun ces réflexions, et mener à une révolution de notre société qui nous permettra d’être plus solides vis à vis des grands dangers qui nous menacent, parmi lesquels les pandémies ne sont qu’un élément secondaire : l’injustice sociale, la haine, la xénophobie et la guerre. Il faut continuer à lutter par le travail et les échanges pour une société universelle plus juste et plus solidaire.

Pour une education citoyenne

Dans le système scolaire français, les programmes du primaire et du collège sont basés sur la notion de moyen. L’objectif pédagogique, c’est de permettre à l’élève d’acquérir les savoirs et les savoirs-faire qui lui permettront de s’intégrer à la société. Mais devant l’immensité des savoirs, cette éducation n’a pas de fin, ni d’objectif précis. Pour nos enseignants, il faudrait, comme eux, passer toute sa vie à l’école….

Cette vision a des vertus, notamment grâce à l’apprentissage de la lecture et du calcul, l’élève apprend peu à peu à être autonome, à penser tout seul. En utilisant les bibliothèques ouvertes de la république, il peut ensuite se forger tout seul une philosophie, un savoir, même s’il a quitté le système scolaire.

Mais cette éducation est déficiente car à l’adolescence les enfants sont pour la plupart dépourvus de conviction citoyenne. Les valeurs des droits de l’homme, ou encore celles de l’environnement leurs sont plus ou moins enseignées comme une teinture, une mode intellectuelle. Ce vernis peut éclater quand la situation sociale locale empire et fait se dégrader les conditions de vie des jeunes, ou lorsqu’ils sont confrontés à une injustice à laquelle ils n’étaient pas préparés. Les partis populistes, les sectes, les extrémistes religieux apportent des solutions simples et recrutent facilement des fanatiques parmis une population d’agneaux.

Le système éducatif actuel enseigne aux enfants comme on imbiberait une éponge : on les plonge dans un liquide amniotique de savoirs variés, dont ils se remplissent passivement. Il faut au contraire leur construire une vision de la vie autour de valeurs universelles indiscutables. Par souci d’objectivité, les professeurs, ou les journalistes, ne veulent pas s’engager, ni prendre parti. C’est compréhensible, quand on se souvient de l’école de la troisième république, qui manipulait les petits français pour leur donner la détestation des nations ennemies. Mais c’est inefficace.

Liberté, égalité et fraternité sont des valeurs universelles, qui sont partagées spontanément par la plupart des humains qui réfléchissent sur leur condition et sur leur rapport aux autres humains. Mais ce sont des valeurs complexes, des forces contradictoires qu’il faut équilibrer (ma liberté doit s’arrêter quand elle s’attaque à celle de mon voisin, mon égal…). Les discours raciste, xénophobe ou sexiste, comme le discours hypercapitalistes sont volontairement plus simples et surtout confortent davantage l’intérêt égoiste de chacun. Les autres me sont inférieurs, je peux continuer à en profiter si je suis puissant, je peux chercher à les soumettre si je suis misérable.

L’école primaire doit apprendre aux enfants qu’ils sont des humains semblables, mais différents. Elle doit apprendre le respect, mais aussi enseigner l’histoire des injustices et des violences. Chaque matière doit être un moyen pour atteindre ce but, la citoyenneté. Les raisonnements logiques du calcul puis des mathématiques doivent permettre de comprendre la différence entre l’équité et la simple égalité. L’apprentissage de la langue principale et des autres langues doivent permettre à chaque enfant à comprendre et à être compris, à s’exprimer et à écouter les autres : ses camarades de classe comme les grandes voix du passé. L’histoire doit rappeler toutes les grandes injustices, les tyrannies, en les opposant à la recherche de la liberté et de l’égalité dans l’avénement des démocraties. La géographie et les sciences doivent permettre d’améliorer, de la maternelle au collège, notre perception de la nature, de notre environnement et de l’univers, la difficulté qu’il y a à comprendre ses lois, la recherche de la vérité et de l’objectivité avec le raisonnement scientifique, les hypothèses, les preuves et l’amélioration des théories. L’apprentissage des arts doit permettre de comprendre l’universalité humaine, sa diversité, sa fragilité et sa grandeur. Le sport doit permettre aux enfants de se confronter dans le respect, de situer leurs qualités et leurs défauts naturels, leur inculquer l’esprit d’équipe et leur prouver qu’ils peuvent progresser par l’effort.

A chaque occasion, l’enseignant doit faire prendre aux élèves une distance sur ce qu’ils ont appris, pour accrocher les savoirs nouveaux aux valeurs universelles permettant de vivre en société, comme des muscles autour d’un squelette moral. Nos enfants seront confrontés à l’injustice sociale, à la guerre : il faut armer leur esprit pour comprendre et résister.

L’école, jusqu’à l’adolescence doit être structurée autour de ce but : former des citoyens. L’enseignement professionnel, à partir de 14 à 16 ans, doit ensuite apprendre un métier à tous les jeune, avec des matières différenciées suivant les gouts et les possibilités de chacun. L’université doit ensuite permettre à chaque citoyen, quel que soit son âge, d’apprendre ce qu’il souhaite pour élever sa compétence ou simplement se cultiver.

glyphosate cache misere

On va lentement vers une interdiction du glyphosate en France. Le plus grave dans cette évolution, c’est que l’on concentre le discours sur cette matière active. Or cet herbicide est dangereux pour la santé, mais sans doute beaucoup moins que les autres herbicides alternatifs que tient prêts l’industrie chimique, bayer/monsanto en tête. Les nouvelles matières actives sont des molécules plus petites, bien plus difficiles à détecter que le glyphosate, et dont les effets nocifs seront encore plus compliqués à mettre en évidence et plus longs à dissiper. Les nano particules associées aux pesticides sont déjà présentes dans notre environneement et vont encore augmenter.

La seule bonne solution réglementaire c’est d’interdire progressivement et universellement tous les herbicides, en menant de pair une vraie révolution technique. Cette révolution devra être aussi sociale et économique, car il faudra, et ce sera une chance pour l’humanité, plus de main d’oeuvre pour l’agriculture.

C’est le contraire du modèle productiviste, où l’on souhaite un agriculteur pour 1000 ha, chargé de faire de la monoculture d’exportation. Il en faut un à l’hectare, qui devra évidemment être pluri actif et produire pour ses voisins. Les productions d’exportation doivent être marginalisées, au moins pour la surface qui leur est consacrée.

Sans cette révolution mondiale, à mettre en oeuvre sans attendre pour sauver l’humanité, les réglementations sanitaires adoptées dans un seul pays riche sont hypocrites et inefficaces.